Abstracts par auteur > Vignes Maguelone

L'espace des parcours de vie : associer approches spatiale et biographique dans l'étude des parcours de soins
Maguelone Vignes  1@  , Marco Ranzato  2@  , Isabelle Heymans  3@  , Sasha Hinz  3@  
1 : Université Catholique de Louvain  (UCL)
2 : Université Libre de Bruxelles [Bruxelles]  (ULB)
3 : Médecins du Monde Belgique  (MDM)

Cette contribution souhaite montrer l'intérêt d'associer à la mise en évidence de l'enchaînement dans le temps des périodes et événements de vie, la prise en compte de la dimension spatiale des parcours de vie pour documenter les pratiques d'accès aux soins et les inégalités qui s'y rapportent. Elle s'appuie sur des travaux antérieurs, réalisés durant ma thèse de doctorat en sociologie, et en cours, dans le cadre d'un post-doctorat au sein du Metrolab, équipe de recherche urbaine transdisciplinaire, à Bruxelles.

Dans la thèse, j'ai conjugué à une approche par récits de vie, les apports de la sociologie de la mobilité afin d'analyser le travail organisationnel que réalisent des malades chroniques pour articuler leurs recours aux soins entre eux et aux activités de leur vie courante. La recherche a notamment permis de séquencer le parcours de soins de personnes vivant avec le VIH à partir d'une vision large de ce qu'elles mettent en œuvre pour se soigner et d'identifier des modes d'action dans chaque séquence. L'étude du « potentiel de mobilité » (Kaufmann, 2002) des personnes a mis en évidence la manière dont elles anticipent ou non la dégradation possible de leur état de santé. Selon la séquence du parcours et leurs différents supports sociaux, certaines personnes font reposer leurs recours aux soins sur une diversité de caractéristiques de l'offre urbaine de soins (hospitalo-centrisme, intégration des soins, diversité de services en ville et/ou à l'hôpital, présence d'un service spécialisé en centre-ville), alors que d'autres font reposer leurs recours sur une seule d'entre elles. Cette dernière situation mine leur capacité de résilience en cas d'événement de vie difficile.

Les services de soins peuvent pallier ces inégalités de différentes manières, ayant des empreintes spatiales diverses. L'une d'elle, qui convient plus particulièrement à des personnes socialement vulnérables, prend la forme du « guichet unique ». A Bruxelles, le projet de création de centres sociaux-sanitaires intégrés porté par Médecins du Monde, en est un cas d'étude. Lors d'un atelier de co-design élaboré avec un architecte du Metrolab et la coordinatrice du projet, nous avons demandé aux professionnels des différentes équipes qui vont se réunir dans un même centre, de s'appuyer sur l'histoire d'un patient pour en décrire l'accompagnement entre différents professionnels. Le récit de vie succinct est ici relaté par les professionnels et sert de point de départ pour spatialiser les trajectoires de patients au sein de leur structure de soins et en dehors. Chaque trajectoire est ainsi représentée sur une carte. Les sept cartes obtenues mettent graphiquement en évidence la manière dont les professionnels collaborent autour du cas complexe d'un patient et en quoi les locaux du futur centre intégré peuvent soutenir ces collaborations.

Ces deux expériences montrent combien les deux dimensions structurantes de la vie humaine – temps et espace – gagnent à être étudiées conjointement pour documenter à la fois la mise en place des ressources de santé mobilisables par les personnes et la manière dont ces personnes mobilisent ces ressources, selon les fluctuations de leur état de santé et en différents moments de leur vie.


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