Abstracts par auteur > Leduc Aude

Précarisation des parcours d'emploi et santé : élaboration d'une typologie à partir d'une cohorte de patients atteints de cancer et application à la population française
Emilie Counil  1, 2, 3@  , Sofyane Issa  4@  , Mélanie Bertin  5@  , Aude Leduc  4@  , Equipe Giscop93  6@  
1 : Institut national d'études démographiques  (INED)
Ministère de l'Enseignement Supérieur et de la Recherche Scientifique
2 : Giscop93  (Giscop93)
Université Paris 13, U.F.R de Santé, Médecine et Biologie Humaine
3 : Institut de Recherche Interdisciplinaire sur les enjeux Sociaux  (IRIS)
Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales (EHESS), CNRS : UMR8156, Institut National de la Santé et de la Recherche Médicale - INSERM, Univerité paris 13
4 : Direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques  (DREES)
Miistère des solidarités et de la santé
5 : Institut de recherche, santé, environnement et travail  (Irset)
Université d'Angers, Universite de Rennes 1, École des Hautes Études en Santé Publique [EHESP], Institut National de la Santé et de la Recherche Médicale, Structure Fédérative de Recherche en Biologie et Santé de Rennes : U1085
6 : Université Paris 13  (UP13)
Université Paris 13, U.F.R de Santé, Médecine et Biologie Humaine

L'importance du rôle du travail dans la construction des inégalités sociales de santé tout au long de la vie demeure un sujet de controverses scientifiques et revêt des enjeux sociaux majeurs. Au début des années 2000, un dispositif d'enquête original sur les cancers d'origine professionnelle a été mis en place en Seine-Saint-Denis. Ce territoire se distingue par son passé industriel, sa population longtemps ouvrière, son histoire migratoire et une surmortalité par cancer observée au cours des 30 dernières années. Ceci en fait un terrain emblématique pour l'étude des inégalités sociales d'expositions aux cancérogènes et de leur inscription dans les processus de précarisation sociale et professionnelle décrits dès le milieu des années 1990.

Partant du signalement de patients atteints de cancer par les hôpitaux partenaires, s'engage une démarche de reconstitution des histoires professionnelles, fondée sur le recueil de l'activité réelle de travail, qui sert de base pour l'expertise pluridisciplinaire des expositions. A partir de 824 histoires professionnelles, nous avons élaboré une typologie quantitative de parcours en référence à la notion de précarisation professionnelle. Nous basant sur 4 caractéristiques de l'emploi (continuité, stabilité, mobilité, polyvalence), nous avons retenu 4 profils-types. A côté des parcours dits « stables usants » (sans évolution de carrière et polyvalents), des parcours « évolutifs » (présentant une mobilité généralement ascendante), et des parcours « sécurisés » (se maintenant durablement à un niveau qualifié), un profil de parcours fortement précarisé représentait plus de 20% de l'échantillon. Ces derniers parcours sont discontinus, caractérisés par une forte instabilité, et parfois une mobilité descendante. On les retrouve plus fréquemment parmi les femmes et ceux entrés dans l'emploi après 1970. Enfin, plus encore que pour les parcours « usants », la multi-exposition professionnelle vie entière y est plus fréquente comparativement aux parcours « sécurisés ».

Nous avons par la suite appliqué cette démarche à l'enquête nationale SIP, Santé itinéraire professionnel, à partir de la vague de 2006. Parmi l'échantillon de 8 428 répondants âgés de 40 à 74 ans, 11% des individus présentaient un parcours fortement précarisé. Les femmes étaient de nouveau surreprésentées, de même qu'au sein des parcours dits « usants ». L'état de santé général (mini-module européen) était plus souvent jugé « moyen » à « très mauvais » parmi les participants ayant eu un parcours « fortement précarisé », avec un gradient similaire entre hommes et femmes.

Conscients des limites de notre démarche, nous poursuivons ces analyses dans une perspective biographique. Nous avons élaboré une typologie de précarisation professionnelle interne à SIP, en arrêtant les parcours en 1999, ne prenons en compte que les événements de santé déclarés entre 2000 et 2010, et intégrons aux modélisations un score de pénibilité des conditions de travail. Notre démarche gagnerait également à intégrer une perspective historique du changement, les changements dans les parcours professionnels pouvant avoir été vécus différemment après-guerre, dans les années 1970, et depuis la fin des années 1980. Enfin, après avoir stratifié toutes les analyses sur le sexe, nous développons une approche genrée de l'analyse des parcours.


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